Grand Prix Québec City

J’espère que ce humble petit bilan vous comblera. Toutefois, ne soyez pas trop exigeants car cette fois, je n’ai pas pu voir la retransmission sur Twitch (à part quelques matchs isolés), et les vidéos ne sont pas encore en ligne.


On commence par la traditionnelle analyse du métagame. Plutôt que de vous rediriger vers le lien (très bien fait, comme souvent) de Wizards of the Coast, je vous propose mon propre « travail ». Je mets des guillements parce que dans les faits, ce n’est pas ça qui a été le plus fatiguant dans l’affaire.

Métagame détaillé

Métagame plus général

91 joueurs ont su glaner 21 points au cours de la première journée du GP. Comme pour le Pro Tour, il s’agit de ne pas se laisser embrumer par le nuage de stats qui nous tombe dessus. Quand on veut trop détailler, on perd de vue les fondamentaux, et le deuxième graphique, moins explicite, est pourtant plus parlant.

Toutefois, on constate que Jeskai et Abzan ont réuni presque la moitié du field du Day 2 au Canada. Est ce vraiment une surprise? Non, car comme je l’avais dit dans mon bilan sur le Pro Tour, le format avait deux façons d’évoluer: tout le monde joue Abzan, ou tout le monde essaie d’anticiper Abzan. Ainsi, la foule a choisi de ne pas choisir, et Abzan et Jeskai sont présents en quantités très comparables.

Attention aux raccourcis toutefois. Le regroupement des Dark-Jeskaï (Yore-Tiller ou YT pour les intimes) et Jeskaï « nature » est très audacieux, notamment dans la situation actuelle. En effet, l’intérêt de jouer YT est justement un Match-Up aussi positif qu’on peut le faire contre Abzan, qui lui par contre massacre Jeskaï pur à la moulinette. J’exagère évidemment pour transmettre l’idée, mais il me semble que dans la prédiction d’un métagame, il ne faudrait pas faire ce regroupement quand le deck qui a eu le plus d’impact est Abzan. Toutefois, il n’y a pas forcément de quoi s’alarmer, les decks Jeskaï purs ne représentant que 3,3% du field (ils étaient trois…). Leur impact dans ce regroupement est donc négligeable.


Ainsi, on en arrive à la situation qu’on a toujours cherché à éviter en Modern, mais qui est beaucoup plus dure à éviter en Standard: l’oligarchie, au moins temporaire, entre deux decks. Ca n’est pas une vraie surprise, il faut le dire. Abzan est sans doute le deck le plus régulier du format et bénéficie d’Anafenza, qui est sans doute la meilleure créature du format actuel (au coude à coude avec le Chevaucheur de Mante), si tant est que cette expression ait le moindre sens. A côté, YT a bénéficié d’une forme de hype lors de ses débuts lors des SCG Open Series à Indianapolis et Atlanta, juste avant le Pro Tour. Mais maintenant, ce n’est plus sur la hype que le deck surfe: il s’agit d’un deck bien positionné dans un méta plein d’Abzans.

Si vous vous souvenez de mon résumé du Pro Tour, j’y évoquais un jeu de Pierre-Feuille-Ciseaux-Lézard-Spock pour décrire le Standard de l’époque. Toutefois, le terrain s’est bien simplifié, et aujourd’hui, on pourrait croire que le concept ne tient plus. Toutefois, il est intéressant de noter que Megamorph, même peu en vergue ce week-end, vient compléter de manière très intéressante le système de Pierre-Feuille-Ciseaux, puisque Abzan bat Megamoprh, YT bat Abzan, et Megamoprh bat YT. A côté de ça, Atarka Red continue d’exister, mais sans l’avantage de la surprise dont a bénéficié la combo Become Immense + Temur Battle Rage (et en particulier, qui a laissé peu de temps aux gens de s’y préparer à 100% pour le PT), on sent déjà que le deck chute en popularité.

A côté de ça, l’innovant Bant Tokens, ayant pourtant connu un franc succès lors du Pro Tour, n’a pas convaincu les adeptes du format. Il faut dire que Black a annoncé lui-même que le deck souffrait face au moindre Dromoka’s Command (DrCo pour les intimes), et malgré une capacité surprenante à partir en « combo », le deck semblait faible contre la pression mise par un Rhino ou une Anafenza. Par conséquent, le deck, sans sombrer dans l’oubli, a été délaissé dans un field où Abzan était fortement anticipé.

Une autre déception est Esper, qui avait pourtant pour lui un magnifique taux de conversion en Day 2 de 70% au PT (le plus haut parmi tous les archétypes), n’a pas su tirer profit de cette bonne publicité. Pourquoi donc? Il y a sans doute une foule de facteurs, mais j’en vois un qui sort clairement du lot: le concurrence de Yore-Tiller. Après tout, YT est un Esper splashé rouge non? Concrètement, comme l’a dit Sam Black lors de ce GP:

“Jeskai is two different decks depending if it has Mantis Riders – it’s hoping to kill someone with it – or if it doesn’t it’s hoping to kill someone as a control decks.”

C’est à dire que Yore-Tiller (oui je m’entête, mais désolé, Black Jeskai est d’une originalité à me faire vomir), s’il a l’option de contrôler la partie à la façon d’un deck Esper, a en plus l’option de partir sur un plan alternatif qui n’a rien de ridicule. Le splash d’une seule couleur, même s’il n’est pas aussi gratuit que ce qu’on aimerait croire, reste peu exigent pour des decks qui veulent tirer la partie en longueur. Et enfin, quand un decck est joué par Jon Finkel alors qu’il atteint un 15° (!) Top 8 de PT, il gagne beaucoup de publicité, et ses concurrents directs en souffrent. Toutefois, il s’agit de ne pas oublier que Esper est une des bases de mana les plus fiables du format, avec Bant, et que, assumant son rôle de Control, Esper a aussi les outils pour s’imposer dans une partie durant longtemps. Le plan Rider de YT reste une alternative salvatrice dans le MU bien sûr, mais si tout se passe « comme prévu », c’est Esper qui a les outils pour s’imposer à la fin. Attention toutefois, car Crackling Doom, malgré ma réticence à l’admettre, reste un autre atout très important de YT, dans le format et dans le MU plus particulièrement. Loin de moi de dire que le choix de se diriger vers YT est totalement illogique donc, mais n’oubliez pas Esper, car ce pack aussi vaut le détour!


Ainsi se conclut l’analyse du méta du Day 2 du GP Québec. Mais maintenant, nous pouvons (et allons!) regarder le Top 32 du tournoi. Ca va nous permettre de voir quelles stratégies ont eu le plus de succès dans un field déchiré entre deux gros decks et plein de petits.

Top 32

Sans grande surprise quand on voit un Top 8 composé de quatre YT et quatre autres archétypes, c’est bien Yore-Tiller qui a profité le plus de ce field dominé par Abzan. Abzan n’est évidemment pas en reste, mais au vu du nombre de représentants du deck en Day 2, on s’attendait sans doute à un peu plus de succès relatif.

Parlons en d’ailleurs du succès relatif! Le graphique suivant montre le taux de présence de chaque archétype majeur en Top 32 par rapport à sa présence en Day 2.

Taux de succès des decks en Day 2

On constate ce qu’on avait déjà deviné: Abzan est à la traîne. Toutefois, il faut prendre ces chiffres avec des pincettes. Si Megamorph place un très beau 43% de succès, il faut bien garder à l’esprit qu’il n’avait que 7 pilotes en Day 2. Par conséquent, il faut bien comprendre que la présence d’un seul pilote en Top 32 lui fait monter ses stats de 14%! En littéralement deux coups de cuillère à pot, il avait dépassé Abzan. La qualité des pilotes et leur chance a un fort impact sur l’évaluation du succès de cet archétype. En revanche, rien ne peut excuser la pauvre performance d’Abzan, ni vraiment celle d’Atarka Red, qui toutes catégories confondues rassemblait 13 représentants et n’en a placé que trois en Top 32.


On vient de voir le Day 2 et le Top 32, et ces explications n’ont finalement pas apporté de conclusion concrètes. Alors allons-y pour un vrai bilan bien senti!

  • Yore-Tiller prend les devant sur la scène du métagame, mais n’est clairement pas invincible! Dans un univers pas si loin que ça, Megamorph aurait gagné le Pro Tour, et ça serait Abzan et Megamoprh qui se seraient déchiré le méta au Canada, avec YT plaçant quelques outsiders en Day 2.
  • Abzan, qui reste mon choix personnel comme deck de référence du format, n’est peut être pas aussi génial que certains voudraient le croire (la personne ciblée se reconnaitra héhé), et ce n’est pas parce qu’un deck gagne un PT qu’il faut le jouer à tout va. Toutefois, vous seriez bien mal avisés de le sous-estimer, car il possède toutes les armes pour être extrêmement viable en tout métagame contemporain! Il a clairement été prouvé que se baser sur un seul évènement pour tirer des conclusions était une mauvaise idée, gardez vous bien de ne vous souvenir que de GPQC pour juger Abzan.
  • Je suis plus enclin à penser toutefois à un effet grégaire qui poussera les gens à déserter Abzan et rejoindre Yore-Tiller. Est ce le moment de déballer Megamorph et Rally? J’ai tendance à dire que oui, mais que vous ne pouvez pas vous permettre de faire l’impasse sur Abzan lors de vos sessions d’entraînement.
  • Comme je le disais précédemment, Atarka Red est sur la pente décroissante. Ca n’a rien de surprenant, et si vous lisez mes autres articles, vous saurez que j’avais prévu ça depuis le début (mais c’est sans doute de la chance, vous connaissez ma fiabilité en pronostics!). A l’heure actuelle, je pense que les gens vont quand même garder ce deck dans un coin de la tête. Je pense que le jouer ce week-end, à un PPTQ ou autre tournoi, n’est pas une idée meilleure ou pire que c’était de le jouer ce week-end. Toutefois, si à Indianapolis, Atarka Red fait un flop, je conseillerai ce deck pour la semaine suivante: comme Affinity en Modern, c’est un deck qui est à son meilleur quand il a touché le fond!
  • Si vous désespérez de voir un méta aussi dominé par un seul (ou deux) archétypes, vous pouvez sourire! N’oubliez pas que juste derrière YT et Abzan, c’est bien Others qui domine le format! Avec un deck Ramp en Top 8 qui fait figure d’extra-terrestre dans le field du Day 2, et Pascal Maynard qui a piloté un deck Rally jusqu’en Top 8 dans un field rempli d’Abzan (FYI, MU quasi-ingagnable, du fait de la simple présence d’Anafenza d’une part, et de Rhino qui est très lourd aussi), il semble légitime de croire que ce Standard donnera aussi du plaisir aux deckbuilders. Je sais que pour la plupart, vous êtes plus préoccupés par le métagame européen. Mais je pense que cette citation d’Obama, énoncée le jour de sa première élection, s’appliquera aussi chez nous:

Is there anyone out there who still doubts that America Standard is a place where all things are possible?

  • Quel sera le deck à jouer à Indianapolis? A l’aveugle, je dirais Megamorph. Le Standard, comme je l’avais annoncé en tout début de saison, sera sans doute comme on l’a connu pendant neuf mois: une rotation des decks to beat. On n’en est encore qu’aux premiers jours du format, et ça ne sera peut être pas le cas finalement. Il est très possible que Yore-Tiller s’impose dans la durée. Mais si c’est le cas, comme je le disais en début d’article, le deck n’est pas invincible, et je ne peux pas l’imaginer rester indéfiniment sur son trône.
  • Un conseil général: Anafenza. Jouez la où que vous soyez. Elle bat en brèche la totalité du métagame:
    • Yore-Tiller a beau récompenser le talent de son pilote, il ne faut pas se fourrer le doigt dans l’oeil, quand un deck joue 6 Commandements, c’est bien pour faire revenir ses créatures du cimetière!
    • Megamorph doit faire une croix sur son plan A, à savoir grinder les ressources adverses à coups d’aller-retour de Raptor et Den Protectors avec le cimetière.
    • En exilant les créatures qu’elle bloque contre Atarka Red, elle retarde d’autant la combo Immense Battle Rage.
    • Rally va devoir se rallier ailleurs. A noter que GB Aristocrats (que je surnomme affectueuement Royal Nassif) y est moins vulnérable, mais souffre quand même le martyr.
    • Eh, même dans le miroir, elle évite aux Hangarback Walkers adverses de faire trop de value et aux Den Protectors de faire revenir des Rhinos!
  • Un autre constat s’impose: le format est lent. Avec la chute d’Atarka Red, il devient moins pressant de se déballer, surtout si prendre son temps veut dire profiter de jolies bases de mana performantes. Même Abzan et Megamoprh, des jeux à forte composante Midrange, mettent des fois une dizaine de tours à tirer leur épingle du jeu! Vous feriez bien de prendre ça en compte lorsque vous tunez vos decks.
  • Enfin, un dernier conseil: n’oubliez aucun deck! Ce n’est pas parce que Esper et Rally sont en manque de résultats que vous devez (ou même pouvez!) les barrer de la liste. Dans l’ombre des deux colosses, il existe beaucoup de decks sous-estimés dans le format, n’hésitez pas à fouiller un peu pour trouver les perles cachées.

Voilà pour ce petit bilan du Grand Prix Québec! C’est évidemment somme toute beaucoup d’interpolation et d’extrapolation, et beaucoup de choses que j’ai dites sont des interprétations ou des conseils personnels. Toutefois, j’espère que cet article, au même titre que le reste du blog, vous aura été profitable dans votre préparation pour vos prochains tournois, ou tout simplement dans la découverte du format.

En tous cas, si ça vous a plu ou si ça vous a servi, n’hésitez pas à « Aimer » ma page sur Facebook ou à suivre @MoudouMTG sur Twitter! Moi, ça me fait plaisir de voir que mon travail (gratuit et par plaisir) vous plaît, et vous, vous serez servi à domicile  🙂 Mais je ne veux forcer la main de personne, je déteste moi même mon attitude actuelle. Bref, je comprendrai parfaitement si vous choisissez de ne pas m’exaucer. C’est pas ça qui m’empêchera de vivre centenaire haha!

Allez sur ce, bonne soirée à tous, et merci d’avoir lu!

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